vendredi 26 juillet 2024

Gigs' Review: EXEK + Delacave, 13 Juin 2024, La Grenze, Strasbourg




A protean, independent, offbeat, often disturbing and decadent, always fresh and jubilant, genre cinema. A24 Studios were as good as ever, legitimately taking on the legacy of the RKO pioneers, of Trauma Entertainment and Wild Side Studio. Above all, the A24's movie proved to be resolutely modern and intelligent, taking up the core of the 'woke' ideology with a skill rarely seen in this rather edgy and inaudible milieu, presenting, as heroes or heroines, some cursed gays and lesbians, some morbidly obese people, some lost souls and depressed minorities, some deadbeats and 'cracked bells' who enjoyed decolonial discourse.
That was pretty much the conclusion I had come to over my dinner on the terrace of the Lebanese restaurant Au Petit Mezze after my screening of Love, Lies, Bleeding at the Vox cinema in Strasbourg. I was feeling good, my mind was sharpened, my stomach settled and my body soothed. I'd enjoyed the city and the solitary stroll along the banks of the River Ill, where the young locals were lounging and embracing. 
And yet, the image that Strasbourg had given to me just a few hours earlier had fully displeased me: my arrival in the shabby area behind the station where I was going to spend the night, the aggressive wankers and penniless migrants over the Place des Halles, the depressed record dealer who was running Locked Grooves, one of the last independent record shops in the city, but for whom the rock'n'roll adventure was on the brink of an end - ‘people don't buy vinyl any more, and everything happens around Metz now’, he told me with a jaded look on his face.

Du cinéma de genre, protéiforme, indépendant, décallé, souvent dérangeant et décadent, toujours frais et jubilatoire. Les studios A24 tapaient décidément avec toujours autant de justesse, et endossaient en toute légitimité l'héritage des pionniers de la RKO, des productions de Trauma Entertainment et de Wild Side Studio. Les films estampillés A24 s'avéraient surtout résolument modernes et intelligents, puisqu'ils reprenaient le fond de commerce de l'idéologie woke avec une habileté rarement observée dans ce milieu pourtant si crispant et inaudible, en présentant, en guise de héros ou d'héroines, des gays et des lesbiennes maudits, des obèses morbides, des paumés et des dépressifs issus de minorités, des laissé-pour-comptes et des cloches fêlées amateurs de discours dé-coloniaux.
C'était, à peu de chose près, la conclusion à laquelle j'étais parvenu, en dînant sur la terrasse du restaurant libanais Au Petit Mezze après ma séance de Love, Lies, Bleeding au cinéma de quartier Vox de Strasbourg. Je me sentais bien, l'esprit affûté, l'estomac calé, le corps apaisé. La ville m'avait plu, j'avais apprécié la promenade solitaire effectuée le long des quais de l'Ill, sur lesquels la jeunesse locale se prélassait et s'enlaçait. 
Pourtant, quelques heures plus tôt, l'image que Strasbourg m'avait offerte m'avait passablement contrarié : mon arrivée dans le quartier miteux derrière la gare, dans lequel j'allais m'établir pour la nuit, les zonards agressifs et les migrants sans le sou sur la place des Halles, le disquaire dépressif qui tenait Locked Grooves, une des rares boutiques de disques indépendantes de la ville, mais pour qui l'aventure du rock'n'roll semblait à deux doigts de s'achever - ''les gens n'achètent plus de vinyles, tout se passe à Metz maintenant'', m'avait-il annoncé l'air blasé.


La Grenze

The spring chill of the evening was stinging my skin with surprise, reminding me that the climate in these latitudes could also have its charms. I finally decided to leave the quiet bourgeois comfort of the city centre and head for the industrial wasteland behind the station. There, former railway workshops had been transformed into La Grenze, a lively, open cultural and artistic space. The place was reminiscent of the socio-cultural, self-managed centres often found on the other side of the Rhine. Alsace had retained the best of the German passage through its territory. 
I spent the next hour draining my three pints of Weizenbier and smoking a few cigarettes, while observing the small groups of people seated at the tables, engaged in quiet discussions from which an occasional stifled laugh was sometimes emerging. It was an audience of cultured thirty and forty-somethings, who seemed particularly respectful of the others, who loved electric bicycles and who certainly voted for the pro-European social democrats.
The evening's programmer finally took out her megaphone to announce the first band, Delacave. Disciplined like everybody else - I generally adapted to local customs - I followed the general movement towards the inside of the hall.
So was beginning my escapade of a few days to the east of France. I'd been thinking for some time about getting lost in this less than enchanting area. It was no doubt due to my desire to track down what was remaining of the glorious epic of La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.

La fraîcheur printanière de la soirée me picotait l'épiderme avec étonnement, me rappelant que le climat sous ces latitudes pouvait aussi avoir son charme. Je m'étais finalement résolu à quitter le petit confort bourgeois et tranquille du centre-ville pour me diriger vers la friche industrielle qui s'étalait derrière la gare. Des anciens ateliers ferroviaires y avaient été transformés en un espace culturel et artistique, vivant et ouvert, La Grenze. Le lieu rappelait ces centres socio-cultulturels ou auto-gérés qu'on trouvait fréquemment de l'autre côté du Rhin. L'Alsace avait conservé le meilleur du passage de son voisin allemand sur son territoire. 
J'avais passé l'heure suivante à vider mes trois pintes de Weizenbier, à fumer quelques cigarettes, tout en observant les petits groupes de gens attablés, lancés dans des discussions peu animées desquelles sortait parfois un rire étouffé. Un public de trentenaires/quarantenaires cultivés, qui semblaient particulièrement respectueux des autres, amateurs de bicyclettes électriques, et qui votaient certainement pour la sociale-démocratie pro-européenne. 
La programmatrice de la soirée avait finalement sorti son porte-voix pour annoncer le premier groupe, Delacave. Discipliné comme tout un chacun - je m'adaptais généralement aux coutumes locales - j'avais suivi le mouvement général vers l'intérieur de la salle.
Ainsi commençait mon escapade de quelques jours dans l'Est de la France. Cela faisait déjà quelque temps qu'avait germé l'idée saugrenue d'aller me perdre dans ce secteur pourtant peu enchanteur. Il fallait sans doute y voir ma volonté de pister ce qu'il restait de la glorieuse épopée de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.


About La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.
Sur La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.

At the turn of the 2000s, the usual little story, inherent in any DIY punk movement, repeated itself in this remote corner of France, with the same efficient recipe : the boredom of a broke youth, the collective emulsion of a handful of resourceful young people, the passion and musical tinkering, the libertarian spirit and the urgency as a philosophy of life, the evolution of friendships and loves. Humanity in all its splendour... The origins of this particular punk movement from Eastern France were now well known. A recent viewing of the admirably documented film La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est x, by Nicolas Drolc and Guillaume Marietta (Les Films Furax, 2022), which featured one of my photos taken more than fifteen years earlier, plunged me back into memories of another time, and helped me to piece together my discovery of this punk nebula.

A good quarter of a century earlier, Royal Records, the label run by Lili Z (Splash-4No-Talents) and affiliated to the Parisian Happy Family, had built a bridge to the East, enabling me to follow with interest the development of the Nancy garage-punk scene, led by the Squares and Thundercrack. With the exploration of the underground ramifications of these two groups, thanks to the first releases on Yakisakana Record, I subsequently witnessed the emergence of the young DIY microcosm of the lo-fi garage-punkers from Metz: the Cheeraksthe Normals and Cheb Samir & the Black Souls Of Leviathan.
Over the following decade, this hard core managed to bring together all the arty-punk, degenerated post-punk, noise, weirdo no-wave, dark-wave, synth-punk and dirty garage bands of the Lorraine underground (A. H. Krakenthe AnalsCradle Of SmurfJunky BrewsterUnasthe Ananasle Sport, etc - often inbred combos), while simultaneously building solid connections with their Strasbourg alter-egos (the Feeling Of LoveMil MascarasCrack und Ultra Eczema...). What we'd later call La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est was born, and from then on, it rapidly extended its tentacular network, as it met new people, to Picardy (Mr Marcaille xUsé xles Morts Vont Bien xHeadwar), Belgium (Kania Tieffer) and even Italy (Maria Violenza xthe IntellectualsMovie Star Junkies). 

Au tournant des années 2000, l'habituelle petite histoire, inhérente à tout mouvement punk DIY, s'était répétée dans ce coin reculé de la France, avec une même recette qui allait une nouvelle fois faire ses preuves : l'ennui d'une jeunesse fauchée, l'émulsion collective d'une poignée de jeunes gens débrouillards, la passion et le bricolage musical, l'esprit libertaire et l'urgence comme philosophie de vie, l'évolution des amitiés et des amours, et l'humanité dans toute sa splendeur... Les origines de ce mouvement de l'Est français était désormais bien connues. Le visionage récent du film, admirablement documenté, La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est x, de Nicolas Drolc et Guillaume Marietta (Les Films Furax, 2022), dans lequel apparaissait une de mes photos prise quinze années plus tôt, m'avait replongé dans des souvenirs d'une autre époque, et aidé à reconstituer le fil de mon exploration de cette nébuleuse punk.

Un gros quart de siècle plus tôt, le pont jeté vers l'Est par Royal Records, le label de Lili Z des Splash-4No-Talents, structure affiliée à la Happy Family parisienne, m'avait permis de suivre avec intérêt le développement de la scène garage-punk nancéenne, the Squares et Thundercrack en tête. En explorant les ramifications souterraines de ces deux groupes, grâce notament aux premières sorties du label Yakisakana Record, j'avais par la suite assisté à l'émergence du jeune microcosme DIY du garage lo-fi messin : the Cheeraksthe Normals et Cheb Samir & the Black Souls Of Leviathan
Pendant toute la décennie suivante, ce noyau dur, basé à Metz, agrégea autour de lui tout ce que l'underground lorrain comptait de groupes arty-punk, post-punk dégénérés, noise, no-wave weirdos, dark-waves, synth-punk, garage cradingues (A.H. Krakenthe AnalsCradle Of SmurfJunky BrewsterUnasthe Ananasle Sport, etc - des combos souvent consanguins) tout en construisant, simultanément, de solides connexions avec ses alter-egos strasbourgeois (the Feeling Of LoveMil MascarasCrack und Ultra Eczema...). Ce qu'on appellerait plus tard La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est s'activait sous mes yeux, et allait dès lors rapidement étendre son réseau tentaculaire, au gré de ses rencontres, vers la Picardie (Mr Marcaille xUsé xles Morts Vont Bien xHeadwar), la Belgique (Kania Tieffer) et même l'Italie (Maria Violenza xthe IntellectualsMovie Star Junkies)


The Normals, l'Excalibur, Reims

2006. My association Music For Stupid Jerks & Silly Girls, set up with my mate Boris Le Hachoir in Reims, took up most of our free time and siphoned off most of our savings. On All Saints' Day, the boss of Too Much Fish in the Sea Records, sister label of Yakisakana Records, offered us the Franco-Italian line-up the Normalsthe Intellectuals for a concert at the Excalibur. We jumped on that chance.
The Normals gave us that night a very classy garage-punk set, with a bit of bluesy strumming and lo-fi vocals - in the Country Teasers vein - while the Italians of the Intellectuals stood out with the shrill mewing of their drummer/vocalist, a few minimalist synth lines and an infectious fuzz energy.
In fact, I had the impression that it was during this tour that the Italian connection between La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est was made: strong chemistry between the two bands, a Normals' tour in Italy a few months later, the bassist, Cheb Samir, who joined the Intellectuals for a while in Rome before founding Capputtini I Lignu with the future Maria Violenza, etc....
Around the same time, the guys from the Feeling Of Love also got in touch with us. But we never managed to get them to come play to Reims.

Three years later my life in the tropics was beginning, with my new parenthood and the setting up of a new life... I gradually disconnected myself from the whole underground punk circles and stopped keeping up with La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, missing out on many bands that were just as exciting: Noir Boy GeorgeFunk Police1400 Points de SuturePlastobétonTélédétente 666le Chômagele Chemin de la HonteScorpion ViolenteMarietta... and Delacave.

2006. Mon association rémoise Music For Stupid Jerks & Silly Girls, montée avec mon compère Boris Le Hachoir, occupait la majeure partie de notre temps libre et siphonnait la plupart de nos économies. À la Toussaint, le boss de Too Much Fish in the Sea Records, label frère de Yakisakana Records, nous avait proposé le plateau franco-italien the Normalsthe Intellectuals pour un concert à l'Excalibur. Nous nous étions empressés d'accepter l'offre.
The Normals nous avaient offert ce soir-là un set de garage-punk très classe, un peu bluesy dans la gratte et lo-fi dans la voix - lignée Country Teasers - tandis que les italiens de the Intellectuals s'étaient distingués par les miaulements stridents de la batteuse/chanteuse, quelques lignes de synthé minimalistes et une énergie fuzz communicative. 
J'avais d'ailleurs l'impression que c'était pendant cette tournée que la connexion italienne de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est s'était effectuée : forte alchimie entre les deux groupes, renvoi d’ascenseur avec une tournée des Normals en Italie quelques mois plus tard, le bassiste, Cheb Samir, qui avait rejoint the Intellectuals quelques temps à Rome avant de fonder Capputtini I Lignu avec la future Maria Violenza, etc...
À la même époque, les gars du Feeling Of Love étaient également entrés en contact avec nous. Nous n'avions cependant jamais réussi à concrétiser leur venue sur Reims.

Trois années plus tard débutaient ma vie sous les tropiques, ma parentalité nouvelle, la mise en place d'une nouvelle vie... Je me déconnectai progressivement de tous les milieux de l'underground punk et cessai de suivre l'actualité de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, passant à côté de nombreux groupes pourtant tout aussi passionnants : Noir Boy GeorgeFunk Police1400 Points de SuturePlastobétonTélédétente 666le Chômagele Chemin de la HonteScorpion ViolenteMarietta... et Delacave.


Enter In Delacave's Void X

The audience in Strasbourg remained reserved, the applause discreet. The cold atmosphere created by Delacave did nothing to break the ice, so there was no encore. I was nevertheless delighted by the duo's performance: the pudgy, bouncy bass, the bossa/post-punk rhythms of the drum machine, the cold-wave organ lines and the gothic feel of the songs, the indus effects... The two hits Enter In and An Escape In Headlights were deeply memorable. I found in that set the spirit and synthetic sounds of Cassablanca by Warum JoeGame And Performance by Deux, or more recently Liqueur Amere by Cherry Pies (2020, Beast Records and Schmalzgrub Audio Kassetten, the K7 label of thee Verduns from Nancy, cousins and (more or less) members of La Grand Triple Alliance). The singer's melodic voice also had something in common with that of Mona Soyoc (Kas Product). 
In the mid-2010s, Liliane Chansard/Duverger, aka Lily ‘Pourie’, played bass and microphone with Sébastien ‘Normal’ Pierre-Jean - a key figure on this Lorraine-Alsace scene - in the kraut-punk band Le Chemin de la Honte. Listening to their eponymous album, released in 2015 by the Parisian label Danger Records, had retrospectively won me over. The duo had formed Delacave a few years earlier, and recorded four albums over the course of the 2010s thanks to the labels POUeT! SchallplattenTeenage Menopause Records and La Belle Brique (the Amiens connection), before quietly disappearing at the turn of the 2020s. Teenage Menopause Records relaunched the band in 2023 with the dreamy Every Night Is A Moon Rising, which Delacave presented to us on this night of June 2024. 

Thus, the nebula of La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, which its members had long jealously guarded on the fringes of rock, and which had always given the image of a furiously deviant and amateur lo-fi punk collective, was now giving birth to some classy, almost professional bands, and no doubt much more accessible for the average indie rock fan. Delacave, like Strasbourg's Marietta (Born Bad Records), seemed to be the flamboyant culmination, the obvious conclusion, the final apotheosis of this epic adventure begun 25 years earlier.

Le public strasbourgeois restait réservé, les applaudissements discrets. L'atmosphère froide développée par Delacave n'incitant nullement à rompre la glace, il n'y eu aucun rappel. La prestation du duo m'enchenta néanmoins : la basse rondouillette et sautillante, les rythmiques bossa/post-punk de la boîte à rythme, les lignes d'orgue cold-wave pour l'habillage gothique des morceaux, les effets indus... Les deux tubes Enter In et An Escape In Headlights étaient profondément marquants. J'y trouvais l'esprit et les sonorités synthétiques d'un Cassablanca de Warum Joe, d'un Game And Performance de Deux, ou plus récemment d'un Liqueur Amere des Cherry Pies (Beast Records et Schmalzgrub Audio Kassetten, label K7 de thee Verduns, des cousins nancéens plus ou moins affiliés, eux aussi, à la Grande Triple Alliance, 2020). La voix mélodique de la chanteuse avait aussi quelque chose à voir avec celle d'une Mona Soyoc (Kas Product). 
Au milieu des années 2010, Liliane Chansard/Duverger, alias Lily 'Pourie', avait déjà tenu la basse et le micro en compagnie de Sébastien 'Normal' Pierre-Jean - personnage-clé cette scène lorraino-alsacienne- au sein du groupe kraut-punk le Chemin de la Honte. L'écoute de leur album éponyme, paru en 2015 chez les parisiens de Danger Records, m'avait rétrospectivement séduit. Le duo avait formé Delacave quelques années plus tôt, et enregistré tout au long de la décennie 2010 quatre albums qui avaient fait les beaux jours des labels POUeT ! SchallplattenTeenage Menopause Records et La Belle Brique (la connexion amiénoise), avant de s'évaporer discrètement au tournant des années 2020. Teenage Menopause Records les avait relancés en 2023 avec le très onirique Every Night Is A Moon Rising, que Delacave nous avait présenté cette nuit de juin 2024. 

Ainsi, la nébuleuse de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, que ses membres avaient longtemps maintenue jalousement dans les marges du rock, et qui avait toujours donné l'image d'un collectif punk lo-fi furieusement déviant et amateur, avait accouché de quelques groupes classieux, quasiment professionnels, et sans doute beaucoup plus abordables pour le commun des amateurs de rock indépendant. Delacave, à l'instar des strasbourgeois de Marietta (Born Bad Records), semblait être l'aboutissement flamboyant, la conclusion évidente, l'apothéose finale de cette aventure épique débutée 25 ans plus tôt.


EXEK X

But EXEK was already taking over from Delacave on the Grenze stage. 
The world of EXEK was familiar to me. Ben Hepworth (bass) and Andrew Brocchi (synth) had played ten years earlier with Repairs, a gothic synth-pop band whose second Ep, Cycle/Decay, had been released by Hozac Records, one of the very few labels I had still been following at the time. Albert Wolski, the lead singer of the band from Melbourne, had been a member of The Shifters x (Future Folklore RecordsTrouble In Mind, 2018), who spearheaded the wave of Australian post-punk that had been sweeping Europe and the United States for the recent years. The Shifters had inspired me to delve back into DIY punk circles and discover a whole host of new bands. They were clearly one of those few bands that provided the initial impetus to start my writing and graphic work when I created my blog. My discovery of EXEK was a logical issue.
With the release of their third album, Some Beautiful Species Left (Anti Fade RecordsSDZ Records, 2019), the band gained a well-deserved recognition in France, thanks in part to the unconditional support and underground network of Parisian label SDZ Records, and EXEK's participation to the anniversary compilation of Les Disques Mauvais Garçons (Born Bad Record Shop - 20 Year Anniversary ! x, 2020), with its soaring song Too Steep A Hill To Climb.

Mais déjà, EXEK prenait le relais de Delacave sur les planches de la scène de la Grenze
L'univers d'EXEK m'était familier. Ben Hepworth (basse) et Andrew Brocchi (synthé) avaient joué une dizaine d'années plus tôt avec Repairs, groupe synth-pop gothique dont Hozac Records, un des rares labels que je suivais encore alors, avait sorti le second Ep, Cycle/Decay. Albert Wolski, le chanteur du combo melbournois, avait officié au sein des Shifters x (Future Folklore Records,Trouble In Mind, 2018), véritable fer de lance de la déferlante du post-punk australien qui touchait depuis quelques années les rivages de l'Europe et des États-Unis. The Shifters m'avait donné l'envie de me replonger dans les milieux du punk DIY et de découvrir quantité de nouveaux groupes, et faisaient clairement partie de ces quelques groupes qui avaient fourni l'impulsion initiale pour débuter mon travail d'écriture et de graphisme, lors de la création de mon blog. Ma découverte d'EXEK s'était donc faite en toute logique.
Avec la sortie de son troisième album, Some Beautiful Species Left (Anti Fade Records, 2019), le groupe avait gagné en France une reconnaissance méritée, grâce, entre autres, au soutien inconditionnel et au réseau underground du label parisien SDZ Records, et à la participation d'EXEK à la compilation anniversaire des Disques Mauvais Garçons (Born Bad Record Shop - 20 Year Anniversary ! x, 2020), avec son planant Too Steep A Hill To Climb.


It's Just A Flesh Wound, Darling !

EXEK was kind of a prolific band. In spring 2024, the five members embarked on their third European tour in support of their sixth album, The Map And The Territory (Foreign Records, 2023). An explicit reference to Michel Houellebecq's 2010 novel La Carte et le Territoire, the graphic version of which I was reading at the same time by an unlikely coincidence, illustrated by Louis Paillard (Flammarion, 2022). I'd picked it up a few days earlier in Nancy, without yet having made the slightest connection between the writer and the musicians. 
On both the novel and the album, you'll find the same unreal atmosphere, a blend of absurdity, melancholy, suspended time, passive wait-and-see attitude, disillusioned fatalism, latent depression and a ghostly overview of one's own life. The nonchalance of the musicians and the detachment of EXEK's singer, the bass lines in turn dub, post-punk or groovy, the airy easy-listening synth, the often free-jazz rhythm of drummer Sam Dixon, the drone flights and progressive rock plans of guitarist Jai K Morris-Smith, the overall sound of kraut-rock, all helped to connect the two masterpiece. We couldn't help but make the connection with certain passages on the album Présence Humaine by the versatile French artist Michel Houellebecq (Tricatel, 2000). A huge novel (winner of the 2010 Prix Goncourt!), a huge album, a huge band, for a huge concert, topped off by the grandiose songs the Lifeboats and It's Just A Flesh Wound, Darling!. And I was already looking forward to repeating the sonic, visual and intellectual experience two days later, at the La Face Cachée festival at Les Trinitaires in Metz, where EXEK had also been invited after their Paris date. 

EXEK était un groupe du genre prolifique. Il effectuait au printemps 2024 sa troisième tournée européenne pour défendre son sixième album - déjà - The Map And The Territory (Foreign Records, 2023). Une référence explicite au roman de 2010 de Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire, dont je lisais au même moment la version graphique, illustrée par Louis Paillard (Flammarion, 2022). Hasard improbable de la vie, je me l'étais procurée quelques jours plus tôt du côté de Nancy, sans avoir encore effectué le moindre rapprochement entre l'écrivain et les musiciens. 
On trouvait, aussi bien sur le roman que sur le disque, la même atmosphère irréelle, où se mélaient l'absurdité, la mélancolie, le temps suspendu, l'attentisme passif, le fatalisme désabusé, la dépression latente, le survol fantomatique de sa propre vie. La nonchalance des musiciens et le détachement du chanteur d'EXEK, les lignes de basse tour à tour dub, post-punk ou groovy, le synthé easy-listening aérien, la rythmique souvent free-jazz du batteur Sam Dixon, les envolées drone et les plans rock progressif du guitariste Jai K Morris-Smith, le rendu général sonnant carrément kraut-rock, contribuaient à inter-connecter les deux œuvres. On ne pouvait aussi s'empêcher d'établir le lien avec certains passages de l'album Présence Humaine de l'artiste polyvalent Michel Houellebecq (Tricatel, 2000). Un immense roman (prix Goncourt 2010!), un immense album, un immense groupe, pour un immense concert, clôturé en apothéose par les grandioses the Lifeboats et It's Just A Flesh Wound, Darling !. Et déjà, je me faisais la joie de réitérer l'expérience sonique, visuelle et intellectuelle, deux jours plus tard, lors du festival de La Face Cachée aux Trinitaires de Metz, sur lequel EXEK avait aussi été invité après sa date parisienne. 




mercredi 3 juillet 2024

Turning Round On The Turntable : Fénwär, L'Appel Du Vide, Killer Kin, Autobahns, S.G.A.T.V., the Judges





FÉNWÄR - St Lp - DEVIANCE/ BLASTING DEAD/ BOURRE PIF/ ZONE ALTERNATIVE/ KEPONTEAM/ LA SOCIÉTÉ PUE/ LADA/ DIY KOLO/ MANGE TON MAÎTRE/ SHUT UP & PLAY THE MUSIC - 2024 X

Fénwär

''What really matters for me in anarco-punk is the DIY and non-profit ethic, and a certain form of generosity. But clearly, I don't give a damn about the social revolt and class struggle aspects - I'm still a die-hard individualist, who only loves his fellows as individuals, but loathes them as a group. As for your music, your Up In Flames reminds me of Heimatlos' NBC, a song that has ever been in my personal punk-hardcore pantheon.''
That was essentially what I told Toffy Patatrak, the bassist of the anarco-punk combo Fénwär, when he expressed his surprise at my offer to help release their album. ''It's not that bad, and we'll be delighted to accept your support'' he replied. Some nice, open-minded people. So the deal was done, overcoming a political stance slightly divergent from my own and a musical aesthetic far removed from my usual credo (garage-punk). The next step was going to sell my thirty or so copies x, of which, without a doubt, regarding my legendary sociability and the incredible extent of my punk network, a good number would be left on my hands.

But enough talking ! So, how good is this Fénwär album? The product is beautiful, the front cover drawing by BELLY is terrific, the 11 tracks are impeccable and turn round over and over again, the band is particularly faithful to its ideals (lyrics included) and the photo-montages of the tropical flowers of Toffy's garden are a welcome replacement for the stereotypical images of children under the bombs featuring on many anarcho-punk albums. It's a classy, honest album which, if it doesn't reinvent the genre, reappropriates it with intelligence!
There's not much to be said here about Fénwär's influences - Discharge and D-beat, anarco-punk from Oi Polloi to Heyoka, French 80s hardcore from the Rapsodie En France period... Nor the female singer's captivating screaming or the feminist lyrics. Nor the underground activism of the members of the Reunionese trio over the last twenty years - the squats of the Lille anarcho-punk scene for Tof, and his former bands Phase Terminale, La Société Elle A Mauvaise Haleine and Makach; the self-managed bars in Saint Étienne and the organisation of tours for grindcore bands for Chloé; the Reunionese hardcore-punk bands the Circle A x and Pluto Crevé x for guitarist JL Schmidt. These subjects have already been covered extensively in these columns x.
However, what is new and highly interesting here, is the activation of the trio's extensive network. A myriad of French labels immediately responded to the band's call and co-produced the record: the punk-hardcore crew from Vosges, Deviance Records (Inner Terrestrials, 20 Minutes de Chaos, Tekken, Vision Of War, etc.); the suburban punx from Bourre Pif Records (Contingent Anonyme, Toxic Waste, Sordid Ship, etc...); the contemporary D-beat lovers of Brittany Blasting Dead Records (Defëkt, Mölär, Capricörn, etc.. ...); the 'punk as fuck' members of Normandy Zone Alternative Records (les Clébards, Human Dog Food, Tukatukas, etc...) and of the forum/label Keponteam (Komptoir Chaos, the Daltonz, Pluto Crevé...), the Lille anarco-punkers in La Société Pue Production (Bakounine, La Société Elle A Mauvaise Haleine, Stateless...), the northern anarco-skins of LADA Records (Traître, Kronstadt, Makach...), and even the Polish crusty punx of DIY Kolo Records. And, of course, Mange Ton Maître, the Reunion's label affiliated to the Patatrak Distrax distro list. No excuses, you now know where to get this magnificent album!

''Ce qui m'intéresse dans l'anarco-punk, c'est l'éthique DIY, le non-profit et une certaine forme de générosité. Mais clairement, l'aspect révolte sociale et lutte des classes, je m'en balec royalement - je reste un indécrottable individualiste, qui n'aime ses congénères qu'en tant qu'individus, mais les exècre en tant que groupe. Pour ce qui est de la musique, votre Up In Flames me rappelle le NBC d'Heimatlos, morceau qui figure depuis toujours dans mon Panthéon personnel du punk-hardcore.''
C'était en substance ce que j'avais expliqué à Toffy Patatrak, le bassiste du combo anarco-punk Fénwär, lorsqu'il avait affiché son étonnement devant ma proposition de participer au financement de leur album. ''C'est déjà pas si mal, m'avait-il répondu, et on accepte ton soutien avec grand plaisir''. Des gens sympathiques et ouverts. L'affaire fut donc conclue, dépassant un positionnement politique sans doute divergent du mien et une esthétique musicale éloignée de mon crédo habituel (le garage-punk). Ne restait plus, dès lors, qu'à écouler ma trentaine de copies x, dont, nul doute, au regard de ma sociabilité légendaire et de l'étendue incroyable de mon réseau punk, une bonne partie me resterait sur les bras.

Mais trêve de bavardages ! Alors, que vaut cet album de Fénwär ? L'objet est magnifique, le graphisme de BELLY terrible, les 11 titres sont impeccables et tournent en boucle, le groupe s'y révèle particulièrement fidèle à ses idéaux (paroles incluses) et les photo-montages des fleurs du jardin de Toffy remplacent agréablement ceux, stéréotypés, d'enfants sous les bombes de bon nombre d'albums anarco-punk. Un album classe, intègre et qui, s'il ne réinvente pas le genre, se le ré-approprie avec intelligence !
On parlera peu ici des influences de Fénwär - en vrac, Discharge et le D-beat, l'anarco-punk, de Oi Polloi à Heyoka, le hardcore 80's français période Rapsodie En France... Ni des hurlements captivants de la chanteuse. Ni des textes féministes. Ni de l'activisme underground des membres du trio réunionnais durant ces vingt dernières années - les squats de la scène anarco-punk lilloise pour Tof, et ses anciens groupes Phase Terminale, La Société Elle A Mauvaise Haleine et Makach ; les bars auto-gérés à Saint Étienne et l'organisation de tournées de groupes grindcore pour Chloé ; les groupes hardcore-punk réunionnais Circle A x et Pluto Crevé x pour le guitariste JL Schmidt. Ces sujets ont déjà été largement abordés dans ces colonnes x.
En revanche, ce qui est nouveau et intéressant à observer ici, c'est l'activation du large réseau du trio. Une myriade de labels hexagonaux a immédiatement répondu à l'appel du groupe et co-produit le disque : les punk-hardcoreux vosgiens de Deviance Records (Inner Terrestrials, 20 Minutes de Chaos, Tekken, Vision Of War, etc...) ; les keupons banlieusards de Bourre Pif Records (Contingent Anonyme, Toxic Waste, Sordid Ship, etc..) ; les bretons amoureux de D-beat contemporain de Blasting Dead Records (Defëkt, Mölär, Capricörn, etc...) ; les 'punk as fuck ' normands de Zone Alternative Records (les Clébards, Human Dog Food, Tukatukas, etc..) et du forum/label Keponteam (Komptoir Chaos, the Daltonz, Pluto Crevé...), les anarco-punk lillois de La Société Pue Production (Bakounine, La Société Elle A Mauvaise Haleine, Stateless...), les anarco-skunk nordistes de LADA Records (Traître, Kronstadt, Makach...), et même les crusty polonais de DIY Kolo Records. Et bien sûr les réunionnais de Mange Ton Maître, label affilié à la liste de distro péi Patatrak Distrax. Aucune excuse, vous saurez désormais où vous procurer ce magnifique objet !


L'APPEL DU VIDE - Metro Lp - IT'S ELEVEN/ SABOTAGE Records - 2024 X

L'Appel Du Vide

The Germans exactly know what's going on when it comes to dark punk rock and sticky post-punk. The Teutonic cold-vawe scene is vivid and lively, and we can easily name a few classy, recent bands : Pinoreks x in Potsdam, die Verlierer x, Pigeon or Liiek in Berlin, or Pisse x in Leipzig, etc... To this fine list, we can also add the Chemnitz band L'Appel du Vide.
With its first Ep Abwärtsspirale (It's Eleven Records, 2022), taken from a demo K7 from 2020, the band hit the nail on the head. In four anguished, tortured tracks, L'Appel Du Vide - quite a programme - summoned up the disillusioned Deutsch-punk of the KbD/Bloodstain Across Germany compilations (Das Bin Ich Nich) and the suicidal cold-wave of the early 80s (pudgy Eisbär-style bass on Delirium, creeping, creepy post-punk on Aufmerksamkeit), and finished the job with the enchanting Das Programm and its ethereal female vocals. The band immediately earned its ticket to the big leagues! And that was far enough for us to have the desire to explore their brand new debut album, Metro.
''Evolution in continuity" might well be the best way to sum it up... Metro has all the charm of the Ep : the same dizzying sense of unease, nihilism and mental malaise (note the reference to Rorschach's projective psychology on the cover), the same effective, heady melodies, the same female chorus (still too few and far between) adding a hell of consistency to the track Fragezeichen, a devastating hit of icy punk rock (Warteschleife), the same German label producing the record (It's Eleven Records, and by the way, check the lately released 7inch by the new Deutsch dark-wave band Mantarochen), and so on...
But Metro also shows an evidence of a break with the previous Ep. The band's sound has evolved, hardening violently, the tempo is often faster, sometimes veering into punk-hardcore, noise distortions and aggressive metallic riffs are omnipresent... With this sickly album, the band takes its place in the current trend of the Anglo-Saxon gloom-punk (Poison Ruïn x, Structure, Institute, Talleen x...) while at the same time, rubs shoulders with the contemporary French hardcore/anarco-punk mouvement (Bleakness, Better Off Dead...). So it's hardly surprising to find Sabotage Records co-producing the album, a label with obvious links to the French Destructure Records and Portland hardcore scene (Autistic Youth, Estranged, Long Knife, Chueko...).

Les allemands savent y faire en matière de punk rock enténébré et de post-punk poisseux. La scène cold-vawe teutonne est en plein effervescence, les récentes sorties de disques de Pinoreks x (Postdam), die Verlierer x, Pigeon ou Liiek (Berlin), ou encore Pisse x (Leipzig), pour n'en citer que quelques uns, en sont une preuve flagrante. On ajoutera désormais à cette belle liste le groupe de Chemnitz l'Appel du Vide.
Avec le Ep Abwärtsspirale (It's Eleven Records, 2022), tiré d'une première démo K7 de 2020, le groupe avait tapé très fort. En quatre titres angoissants et torturés, l'Appel Du Vide - tout un programme - y convoquait le Deutsch-punk désabusé des compilations KbD/Bloodstain Across Germany (Das Bin Ich Nich) et la cold suicidaire du début des années 80 (basse rondouillette à la Eisbär sur Delirium, post-punk rampant et glauque sur Aufmerksamkeit), pour achever le travail avec l'enjôleur Das Programm et son chant féminin éthéré. Le groupe y gagna immédiatement son ticket d'entrée pour la cours des grands ! Il n'en fallait pas plus pour aller explorer ce tout récent premier album, Metro.
''L'évolution dans la continuité'' pourrait bien être la formule pour le résumer... On retrouve sur Metro ce qui faisait le charme du Ep : cette impression vertigineuse de malaise, de nihilisme, de mal-être mental (à noter le clin d'oeil à la psychologique projective de Rorschach sur la pochette), ces mélodies efficaces et entêtantes, ces cœurs féminins (encore trop peu présents) apportant une sacrée consistance (Fragezeichen), ce tube dévastateur de punk rock glacial (Warteschleife), un même label allemand à la production, It's Eleven Records (écoutez au passage le 45 tours du nouveau groupe de Deutsch dark-wave Mantarochen), etc...
Metro témoigne pourtant d'une rupture. Le son du groupe a évolué, se durcissant violemment, le tempo est souvent plus rapide, virant parfois au punk-hardcore, les distortions noise et les riffs métalliques aggressifs sont omniprésents... Avec cet album maladif, le groupe prend toute sa place dans le courant actuelle du gloom-punk anglo-saxon (Poison Ruïn x, Structure, Institute, Talleen x...) tout en fricottant gentillement avec le hardcore/anarco-punk français contemporain (Bleakness, Better Off Dead...). Pas étonnant, dès lors, de retrouver à la co-production Sabotage Records, un label dont le copinage avec les français de Destructure Records et les liens avec la scène hardcore de Portland (Autistic Youth, Estranged, Long Knife, Chueko...) sont manifestes.


KILLER KIN - Point Blank Sp - WAP SHOO WAP Records 2024 X

Killer Kin

Holy mackerel ! I spent these last two years being convinced that Chloé Rose, the guitarist of Killer Kin, the female rocker with a pretty Gibson Flying V guitar, was none other than Viki Venom, the singer/guitarist of Tramp (remember Jailbait ? x) : physical resemblance, similar punk-SM look, close location of the two bands towards the North/East of the USA, etc.... I finally understood my mistake after reading lately a few exchanges on Beb Soggy's social network. Yes, the singer of the 1981's legendary song Waiting For The War, whom Killer Kin had the pleasure to invite on stage during the first European tour of the band last month. For the epic, Beb was also one of the most loyal supporters of our garage-punk gigs at the Excalibur in Reims some twenty years ago.
At least, this story of resemblance made me discover the Connecticut Killer Kin just after the release of Sonic Love (Pig Baby Records, 2021), its first single, quickly followed by its eponymous debut album (released by the legendary Cleveland punk label Dead Beat Records in 2023). These two records are bursting with energy and power, the singer bellowing in all directions, the female guitarist wearing leather and stilettos and balancing ingenious solos and pithy heavy plans, while the other band members wear studded belts, biker boots and hard-rockers' caps. The whole thing smacks of motorbike chain fights and the American heavy rock'n'roll, proto-punk and hard-punk scene of the 70s. The Killer Kin's sound hides the Stooges (Mattie Léa, Killer Kin's muscular singer, bare-chested, adopts the taut posture of international Iggy), Black Sabbath and Motörhead, the New York Dolls and the Dead Boys, with the added touch of modern heavy-punk currently being found in many Australian bands (Legless Records leading the way with C.O.F.F.I.N. x, Street Sweeper, Leatherman...).
Point Blank and Mr Dynamite, the two lately-recorded tracks of this 7inch, released by the Dutch label Wap Shoo Wap Records (the Mocks x!) will for sure cure your tinnitus, and remind us that the Killer Kin's adventure is just beginning.

Epilogue : Chloé Rose has just told me that I'm not completely wrong. She does indeed officiate in Tramp, as second guitarist/composer. But under the nickname Suzi Sleeve!

Saperlipopette ! J'ai passé deux ans à être persuadé que Chloé Rose, la guitariste de Killer Kin, la rockeuse avec une jolie Gibson Flying V, n'était autre que Viki Venom, la chanteuse/guitariste de Tramp x : ressemblance physique, look punk-SM similaire, localisation rapprochée des deux groupes vers le Nord/Est des USA, etc... Il aura finalement fallu la lecture de quelques échanges sur le réseau social de Beb Soggy pour comprendre mon erreur. Oui, Beb Soggy, le chanteur du mythique Waiting For The War de 1981, que le groupe Killer Kin a eu le plaisir d'inviter sur scène lors de sa première tournée européenne le mois dernier. Beb, qui fut, pour la petite histoire, l'un des plus fidèles supporteurs rémois de nos concerts garage-punk organisés à l'Excalibur il y a une vingtaine d'années.
Cette histoire de ressemblance m'aura au moins permis de découvrir ce groupe du Connecticut, juste après la sortie de Sonic Love (Pig Baby Records, 2021), son premier simple, rapidement suivi par le premier album éponyme (sorti par l'excellent label punk de Cleveland Dead Beat Records en 2023). Ces deux disques débordent d'énergie et de puissance, le chanteur beugle dans tous les sens, la guitariste en cuir/talon-aiguilles balance solo ingénieux et plans heavy lapidaires, les autres membres du groupe ne sont pas en reste et s'affirment en ceintures à clous, santiags de bikers et casquettes de hard-rockeurs. Tout cela fleure bon les bastons à coup de chaînes de moto et le milieu du heavy rock'n'roll, du proto-punk et du hard-punk américains des années 70. On retrouve donc dans Killer Kin du Stooges (Mattie Léa, le musculeux chanteur de Killer Kin, torse-nu et ultra-taillé, adopte d'ailleurs la posture toute en tension de notre Iggy international), du Black Sabbath et du Motörhead, du New York Dolls et du Dead Boys, avec en sus, la touche de modernité heavy-punk actuellement observable chez pas mal de groupes australiens (Legless Records en tête avec C.O.F.F.I.N. x, Street Sweeper, Leatherman...).
Point Blank et Mr Dynamite, leurs deux derniers titres enregistrés et gravés sur ce 45 tours, sortis par les hollandais de Wap Shoo Wap Records (the Mocks x !) devraient, eux aussi, soigner vos acouphènes, et nous rappelent que l'aventure Killer Kin ne fait que débuter.

Épilogue : Chloé Rose vient de m'affirmer que je n'avais pas complètement tort. Elle officie bien dans Tramp, en tant que seconde guitariste/compositrice. Mais sous le nom de Suzi Sleeve !


AUTOBAHNS / S.G.A.T.V. - S/t Split Ep - CUERDAS FUERA Records - 2023 X

Autobahns/SGATV

We just mentioned Legless Records... For once, Rye's label is stepping outside its usual Aussie-Australian credo to produce the debut album by Autobahns, the solo egg-punk project by Swiss-German Giuliano Iannarella. This self-taught, hyperactive, jack-of-all-trades musician has played with the post-garage/arty-punk collective Leopardo (Malcantone, SDZ Records x, 2021, to name but one album), the synth/egg-punk combo Sick Guitars And Terror Visions, aka SGATV (Augeil Records) and the synth-pop/post-punk band Julien Papen (Magüt Records). His musical activism and resolutely modern sounds are reminiscent of those of the compulsory Nic Vicario (Smirk x), Ishka Meades (TeeVee Repairmann x, Remote Control x, Set-Top Box x...), Kyle Harms (Cherry Cheeks x), Billy Twyford (Billiam x) and many others...
The release of this Autobahns album, First Lp!, is the perfect excuse to dig back this split-Ep that was too quickly buried down last year – yes, due to a lack of time, it's impossible for me to review all the nuggets that come out every month...
On the A-side, Autobahns offer the single versions of Full Of Dogs and I Like Tomorrow, two tracks also present on the album, with a pure Devo-core touch à la Prison Affair x (note that the label in charge here, Cuervas Fuera Records, also released the Spanish band's first Ep), while on the other side, S.G.A.T.V. throw in an edgy, eggy I Need You, as well as a beautiful synth-pop hit, Ghost, taken from the 2020 demo Don't Talk To Me, and worthy of the Wizzard Sleeve's Pterodactyl Meltdown (Hozac Records, 2007) or the Hierophants' Stoned (Anti Fade Records, 2016). Top!

On vient d'évoquer Legless Records, justement... Une fois n'est pas coutume, le label de Rye sort de son crédo australo-australien habituel pour produire le premier album d'Autobahns, projet-solo egg-punk du germano-suisse Giuliano Iannarella. On a pu croiser ce musicien autodidacte, hyperactif et touche-à-tout au sein du collectif post-garage/arty-punk Leopardo (Malcantone, SDZ Records x, 2021, pour ne citer qu'un seul album), du combo synth-punk/egg-punk Sick Guitars And Terror Visions, alias SGATV (Augeil Records) ou du groupe synth-pop/post-punk Julien Papen (Magüt Records). Un activisme musical et des sonorités résolument modernes qui ne sont pas sans rappeller celles des excellents Nic Vicario (Smirk x), Ishka Meades (TeeVee Repairmann x, Remote Control x, Set-Top Box x...), Kyle Harms (Cherry Cheeks x), Billy Twyford (Billiam x) et de tant d'autres...
La sortie de cet album d'Autobahns, First Lp !, est l'excuse rêvée pour ressortir ce split-Ep trop rapidement archivé l'année dernière – oui, il m'est impossible de passer en revue toutes les merveilles qui sortent chaque mois...
En face A, Autobahns propose les versions single de Full Of Dogs et I Like Tomorrow, deux titres également présents sur l'album, composés sur une lignée Devo-core à la sauce Prison Affair x (on notera que le label à la manoeuvre ici, Cuervas Fuera Records, a également sorti le premier Ep du groupe espagnol), tandis que sur l'autre face, S.G.A.T.V. balance un très nerveux et eggy I Need You, ainsi qu'un très beau morceau de pop synthétique, le tubesque Ghost, issu de la démo Don't Talk To Me de 2020, et digne d'un Pterodactyl Meltdown de Wizzard Sleeve (Hozac Records, 2007) ou d'un Stoned de Hierophants (Anti Fade Records, 2016). Top !


THE JUDGES - Guns Sp - ANTI FADE/ DRUNKEN SAILOR Records - 2024 X

The Judges

And here we come again with Anti Fade Records! The crew that has gravitated around the Melbourn-based structure for a good fifteen years is back together with the Judges. The band features label boss Billy Gardner on bass (Ausmuteants, Living Eyes...), his brother Zane on guitar (Wet Blankets, Cereal Killers), Mitch Campleman on drums (Smarts, Living Eyes), Austin Haire on second guitar (the Prize x) and Sam Hill on vocals (Cowebbs, Police Force, Nightclub). We can't expect something that's not addictive and high quality.
This new project combines proto/pre-punk à la Modern Lovers, Australian punk-77 à la Saints and garage-punk à la Radio Birdman. Judges' music is packed with catchy melodies, tangy guitar flourishes, nonchalant vocals and tracks that are often rhythmic - (The People Want A) Show - or sometimes haunting (Guns), verging on progressive rock. The length of the tracks may scare off garage and punk fans, but it's all very well executed.
The first album, released at the end of 2023 (Judgement Day, Total Punk/ Anti Fade Records - two guarantees of quality), closely followed by this single, herald the band's imminent summer tour of France, Spain and Germany. A fine tour, organized once again by the fine team at U-Turn Touring - made up of the former Get Action team from the dreaming gigs at the Parisian Gambetta and augmented by a member of the TV Killers.

Et hop, on reparle d'Anti Fade Records ! La clique gravitant depuis une bonne quinzaine d'années autour de la structure melbournoise s'est donnée rendez-vous avec the Judges. On y retrouve le boss du label, Billy Gardner à la basse (Ausmuteants, Living Eyes...), son frangin Zane à la guitare (Wet Blankets, Cereal Killers), Mitch Campleman à la batterie (Smarts, Living Eyes), Austin Haire à la seconde guitare (the Prize x) et Sam Hill, au chant (Cobwebbs, Police Force, Nightclub). On s'attend forcément à un truc hautement qualitatif et addictif.
Ce nouveau projet allie proto/pré-punk à la Modern Lovers, punk-77 australien à la Saints et garage-punk lignée Radio Birdman. La musique des Judges est bourrée de mélodies accrocheuses, de fioritures acidulées à la guitare, de nonchalance au niveau du chant, de morceaux souvent rythmé - (The People Want A) Show - ou parfois lancinants (Guns), à la limite du rock progressif. La longueur des morceaux peut effrayer le garageux et le keupon, mais ça passe très bien.
Le premier album, paru fin 2023 (Judgement Day, Total Punk/ Anti Fade Records - deux gages de qualité), suivi de près par ce 45 tours, annoncent la virée estivale imminente du groupe en France, Espagne et Allemagne. Une jolie tournée, organisée une fois de plus par la fine équipe de U-Turn Touring - composée de l'ancien attelage des concerts Get Action du Gambetta et augmentée d'un membre des TV Killers.