A protean, independent, offbeat, often disturbing and decadent, always fresh and jubilant, genre cinema. A24 Studios were as good as ever, legitimately taking on the legacy of the RKO pioneers, of Trauma Entertainment and Wild Side Studio. Above all, the A24's movie proved to be resolutely modern and intelligent, taking up the core of the 'woke' ideology with a skill rarely seen in this rather edgy and inaudible milieu, presenting, as heroes or heroines, some cursed gays and lesbians, some morbidly obese people, some lost souls and depressed minorities, some deadbeats and 'cracked bells' who enjoyed decolonial discourse.
That was pretty much the conclusion I had come to over my dinner on the terrace of the Lebanese restaurant Au Petit Mezze after my screening of Love, Lies, Bleeding at the Vox cinema in Strasbourg. I was feeling good, my mind was sharpened, my stomach settled and my body soothed. I'd enjoyed the city and the solitary stroll along the banks of the River Ill, where the young locals were lounging and embracing.
And yet, the image that Strasbourg had given to me just a few hours earlier had fully displeased me: my arrival in the shabby area behind the station where I was going to spend the night, the aggressive wankers and penniless migrants over the Place des Halles, the depressed record dealer who was running Locked Grooves, one of the last independent record shops in the city, but for whom the rock'n'roll adventure was on the brink of an end - ‘people don't buy vinyl any more, and everything happens around Metz now’, he told me with a jaded look on his face.
Du cinéma de genre, protéiforme, indépendant, décallé, souvent dérangeant et décadent, toujours frais et jubilatoire. Les studios A24 tapaient décidément avec toujours autant de justesse, et endossaient en toute légitimité l'héritage des pionniers de la RKO, des productions de Trauma Entertainment et de Wild Side Studio. Les films estampillés A24 s'avéraient surtout résolument modernes et intelligents, puisqu'ils reprenaient le fond de commerce de l'idéologie woke avec une habileté rarement observée dans ce milieu pourtant si crispant et inaudible, en présentant, en guise de héros ou d'héroines, des gays et des lesbiennes maudits, des obèses morbides, des paumés et des dépressifs issus de minorités, des laissé-pour-comptes et des cloches fêlées amateurs de discours dé-coloniaux.
C'était, à peu de chose près, la conclusion à laquelle j'étais parvenu, en dînant sur la terrasse du restaurant libanais Au Petit Mezze après ma séance de Love, Lies, Bleeding au cinéma de quartier Vox de Strasbourg. Je me sentais bien, l'esprit affûté, l'estomac calé, le corps apaisé. La ville m'avait plu, j'avais apprécié la promenade solitaire effectuée le long des quais de l'Ill, sur lesquels la jeunesse locale se prélassait et s'enlaçait.
Pourtant, quelques heures plus tôt, l'image que Strasbourg m'avait offerte m'avait passablement contrarié : mon arrivée dans le quartier miteux derrière la gare, dans lequel j'allais m'établir pour la nuit, les zonards agressifs et les migrants sans le sou sur la place des Halles, le disquaire dépressif qui tenait Locked Grooves, une des rares boutiques de disques indépendantes de la ville, mais pour qui l'aventure du rock'n'roll semblait à deux doigts de s'achever - ''les gens n'achètent plus de vinyles, tout se passe à Metz maintenant'', m'avait-il annoncé l'air blasé.
La Grenze
The spring chill of the evening was stinging my skin with surprise, reminding me that the climate in these latitudes could also have its charms. I finally decided to leave the quiet bourgeois comfort of the city centre and head for the industrial wasteland behind the station. There, former railway workshops had been transformed into La Grenze, a lively, open cultural and artistic space. The place was reminiscent of the socio-cultural, self-managed centres often found on the other side of the Rhine. Alsace had retained the best of the German passage through its territory.
I spent the next hour draining my three pints of Weizenbier and smoking a few cigarettes, while observing the small groups of people seated at the tables, engaged in quiet discussions from which an occasional stifled laugh was sometimes emerging. It was an audience of cultured thirty and forty-somethings, who seemed particularly respectful of the others, who loved electric bicycles and who certainly voted for the pro-European social democrats.
The evening's programmer finally took out her megaphone to announce the first band, Delacave. Disciplined like everybody else - I generally adapted to local customs - I followed the general movement towards the inside of the hall.
So was beginning my escapade of a few days to the east of France. I'd been thinking for some time about getting lost in this less than enchanting area. It was no doubt due to my desire to track down what was remaining of the glorious epic of La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.
La fraîcheur printanière de la soirée me picotait l'épiderme avec étonnement, me rappelant que le climat sous ces latitudes pouvait aussi avoir son charme. Je m'étais finalement résolu à quitter le petit confort bourgeois et tranquille du centre-ville pour me diriger vers la friche industrielle qui s'étalait derrière la gare. Des anciens ateliers ferroviaires y avaient été transformés en un espace culturel et artistique, vivant et ouvert, La Grenze. Le lieu rappelait ces centres socio-cultulturels ou auto-gérés qu'on trouvait fréquemment de l'autre côté du Rhin. L'Alsace avait conservé le meilleur du passage de son voisin allemand sur son territoire.
J'avais passé l'heure suivante à vider mes trois pintes de Weizenbier, à fumer quelques cigarettes, tout en observant les petits groupes de gens attablés, lancés dans des discussions peu animées desquelles sortait parfois un rire étouffé. Un public de trentenaires/quarantenaires cultivés, qui semblaient particulièrement respectueux des autres, amateurs de bicyclettes électriques, et qui votaient certainement pour la sociale-démocratie pro-européenne.
La programmatrice de la soirée avait finalement sorti son porte-voix pour annoncer le premier groupe, Delacave. Discipliné comme tout un chacun - je m'adaptais généralement aux coutumes locales - j'avais suivi le mouvement général vers l'intérieur de la salle.
Ainsi commençait mon escapade de quelques jours dans l'Est de la France. Cela faisait déjà quelque temps qu'avait germé l'idée saugrenue d'aller me perdre dans ce secteur pourtant peu enchanteur. Il fallait sans doute y voir ma volonté de pister ce qu'il restait de la glorieuse épopée de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.
About La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.
Sur La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est.
At the turn of the 2000s, the usual little story, inherent in any DIY punk movement, repeated itself in this remote corner of France, with the same efficient recipe : the boredom of a broke youth, the collective emulsion of a handful of resourceful young people, the passion and musical tinkering, the libertarian spirit and the urgency as a philosophy of life, the evolution of friendships and loves. Humanity in all its splendour... The origins of this particular punk movement from Eastern France were now well known. A recent viewing of the admirably documented film La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est x, by Nicolas Drolc and Guillaume Marietta (Les Films Furax, 2022), which featured one of my photos taken more than fifteen years earlier, plunged me back into memories of another time, and helped me to piece together my discovery of this punk nebula.
A good quarter of a century earlier, Royal Records, the label run by Lili Z (Splash-4/ No-Talents) and affiliated to the Parisian Happy Family, had built a bridge to the East, enabling me to follow with interest the development of the Nancy garage-punk scene, led by the Squares and Thundercrack. With the exploration of the underground ramifications of these two groups, thanks to the first releases on Yakisakana Record, I subsequently witnessed the emergence of the young DIY microcosm of the lo-fi garage-punkers from Metz: the Cheeraks, the Normals and Cheb Samir & the Black Souls Of Leviathan.
Over the following decade, this hard core managed to bring together all the arty-punk, degenerated post-punk, noise, weirdo no-wave, dark-wave, synth-punk and dirty garage bands of the Lorraine underground (A. H. Kraken, the Anals, Cradle Of Smurf, Junky Brewster, Unas, the Ananas, le Sport, etc - often inbred combos), while simultaneously building solid connections with their Strasbourg alter-egos (the Feeling Of Love, Mil Mascaras, Crack und Ultra Eczema...). What we'd later call La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est was born, and from then on, it rapidly extended its tentacular network, as it met new people, to Picardy (Mr Marcaille x, Usé x, les Morts Vont Bien x, Headwar), Belgium (Kania Tieffer) and even Italy (Maria Violenza x, the Intellectuals, Movie Star Junkies).
Au tournant des années 2000, l'habituelle petite histoire, inhérente à tout mouvement punk DIY, s'était répétée dans ce coin reculé de la France, avec une même recette qui allait une nouvelle fois faire ses preuves : l'ennui d'une jeunesse fauchée, l'émulsion collective d'une poignée de jeunes gens débrouillards, la passion et le bricolage musical, l'esprit libertaire et l'urgence comme philosophie de vie, l'évolution des amitiés et des amours, et l'humanité dans toute sa splendeur... Les origines de ce mouvement de l'Est français était désormais bien connues. Le visionage récent du film, admirablement documenté, La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est x, de Nicolas Drolc et Guillaume Marietta (Les Films Furax, 2022), dans lequel apparaissait une de mes photos prise quinze années plus tôt, m'avait replongé dans des souvenirs d'une autre époque, et aidé à reconstituer le fil de mon exploration de cette nébuleuse punk.
Un gros quart de siècle plus tôt, le pont jeté vers l'Est par Royal Records, le label de Lili Z des Splash-4/ No-Talents, structure affiliée à la Happy Family parisienne, m'avait permis de suivre avec intérêt le développement de la scène garage-punk nancéenne, the Squares et Thundercrack en tête. En explorant les ramifications souterraines de ces deux groupes, grâce notament aux premières sorties du label Yakisakana Record, j'avais par la suite assisté à l'émergence du jeune microcosme DIY du garage lo-fi messin : the Cheeraks, the Normals et Cheb Samir & the Black Souls Of Leviathan.
Pendant toute la décennie suivante, ce noyau dur, basé à Metz, agrégea autour de lui tout ce que l'underground lorrain comptait de groupes arty-punk, post-punk dégénérés, noise, no-wave weirdos, dark-waves, synth-punk, garage cradingues (A.H. Kraken, the Anals, Cradle Of Smurf, Junky Brewster, Unas, the Ananas, le Sport, etc - des combos souvent consanguins) tout en construisant, simultanément, de solides connexions avec ses alter-egos strasbourgeois (the Feeling Of Love, Mil Mascaras, Crack und Ultra Eczema...). Ce qu'on appellerait plus tard La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est s'activait sous mes yeux, et allait dès lors rapidement étendre son réseau tentaculaire, au gré de ses rencontres, vers la Picardie (Mr Marcaille x, Usé x, les Morts Vont Bien x, Headwar), la Belgique (Kania Tieffer) et même l'Italie (Maria Violenza x, the Intellectuals, Movie Star Junkies).
The Normals, l'Excalibur, Reims
2006. My association Music For Stupid Jerks & Silly Girls, set up with my mate Boris Le Hachoir in Reims, took up most of our free time and siphoned off most of our savings. On All Saints' Day, the boss of Too Much Fish in the Sea Records, sister label of Yakisakana Records, offered us the Franco-Italian line-up the Normals/ the Intellectuals for a concert at the Excalibur. We jumped on that chance.
The Normals gave us that night a very classy garage-punk set, with a bit of bluesy strumming and lo-fi vocals - in the Country Teasers vein - while the Italians of the Intellectuals stood out with the shrill mewing of their drummer/vocalist, a few minimalist synth lines and an infectious fuzz energy.
In fact, I had the impression that it was during this tour that the Italian connection between La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est was made: strong chemistry between the two bands, a Normals' tour in Italy a few months later, the bassist, Cheb Samir, who joined the Intellectuals for a while in Rome before founding Capputtini I Lignu with the future Maria Violenza, etc....
Around the same time, the guys from the Feeling Of Love also got in touch with us. But we never managed to get them to come play to Reims.
Three years later my life in the tropics was beginning, with my new parenthood and the setting up of a new life... I gradually disconnected myself from the whole underground punk circles and stopped keeping up with La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, missing out on many bands that were just as exciting: Noir Boy George, Funk Police, 1400 Points de Suture, Plastobéton, Télédétente 666, le Chômage, le Chemin de la Honte, Scorpion Violente, Marietta... and Delacave.
2006. Mon association rémoise Music For Stupid Jerks & Silly Girls, montée avec mon compère Boris Le Hachoir, occupait la majeure partie de notre temps libre et siphonnait la plupart de nos économies. À la Toussaint, le boss de Too Much Fish in the Sea Records, label frère de Yakisakana Records, nous avait proposé le plateau franco-italien the Normals/ the Intellectuals pour un concert à l'Excalibur. Nous nous étions empressés d'accepter l'offre.
The Normals nous avaient offert ce soir-là un set de garage-punk très classe, un peu bluesy dans la gratte et lo-fi dans la voix - lignée Country Teasers - tandis que les italiens de the Intellectuals s'étaient distingués par les miaulements stridents de la batteuse/chanteuse, quelques lignes de synthé minimalistes et une énergie fuzz communicative.
J'avais d'ailleurs l'impression que c'était pendant cette tournée que la connexion italienne de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est s'était effectuée : forte alchimie entre les deux groupes, renvoi d’ascenseur avec une tournée des Normals en Italie quelques mois plus tard, le bassiste, Cheb Samir, qui avait rejoint the Intellectuals quelques temps à Rome avant de fonder Capputtini I Lignu avec la future Maria Violenza, etc...
À la même époque, les gars du Feeling Of Love étaient également entrés en contact avec nous. Nous n'avions cependant jamais réussi à concrétiser leur venue sur Reims.
Trois années plus tard débutaient ma vie sous les tropiques, ma parentalité nouvelle, la mise en place d'une nouvelle vie... Je me déconnectai progressivement de tous les milieux de l'underground punk et cessai de suivre l'actualité de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, passant à côté de nombreux groupes pourtant tout aussi passionnants : Noir Boy George, Funk Police, 1400 Points de Suture, Plastobéton, Télédétente 666, le Chômage, le Chemin de la Honte, Scorpion Violente, Marietta... et Delacave.
Enter In Delacave's Void X
The audience in Strasbourg remained reserved, the applause discreet. The cold atmosphere created by Delacave did nothing to break the ice, so there was no encore. I was nevertheless delighted by the duo's performance: the pudgy, bouncy bass, the bossa/post-punk rhythms of the drum machine, the cold-wave organ lines and the gothic feel of the songs, the indus effects... The two hits Enter In and An Escape In Headlights were deeply memorable. I found in that set the spirit and synthetic sounds of Cassablanca by Warum Joe, Game And Performance by Deux, or more recently Liqueur Amere by Cherry Pies (2020, Beast Records and Schmalzgrub Audio Kassetten, the K7 label of thee Verduns from Nancy, cousins and (more or less) members of La Grand Triple Alliance). The singer's melodic voice also had something in common with that of Mona Soyoc (Kas Product).
In the mid-2010s, Liliane Chansard/Duverger, aka Lily ‘Pourie’, played bass and microphone with Sébastien ‘Normal’ Pierre-Jean - a key figure on this Lorraine-Alsace scene - in the kraut-punk band Le Chemin de la Honte. Listening to their eponymous album, released in 2015 by the Parisian label Danger Records, had retrospectively won me over. The duo had formed Delacave a few years earlier, and recorded four albums over the course of the 2010s thanks to the labels POUeT! Schallplatten, Teenage Menopause Records and La Belle Brique (the Amiens connection), before quietly disappearing at the turn of the 2020s. Teenage Menopause Records relaunched the band in 2023 with the dreamy Every Night Is A Moon Rising, which Delacave presented to us on this night of June 2024.
Thus, the nebula of La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, which its members had long jealously guarded on the fringes of rock, and which had always given the image of a furiously deviant and amateur lo-fi punk collective, was now giving birth to some classy, almost professional bands, and no doubt much more accessible for the average indie rock fan. Delacave, like Strasbourg's Marietta (Born Bad Records), seemed to be the flamboyant culmination, the obvious conclusion, the final apotheosis of this epic adventure begun 25 years earlier.
Le public strasbourgeois restait réservé, les applaudissements discrets. L'atmosphère froide développée par Delacave n'incitant nullement à rompre la glace, il n'y eu aucun rappel. La prestation du duo m'enchenta néanmoins : la basse rondouillette et sautillante, les rythmiques bossa/post-punk de la boîte à rythme, les lignes d'orgue cold-wave pour l'habillage gothique des morceaux, les effets indus... Les deux tubes Enter In et An Escape In Headlights étaient profondément marquants. J'y trouvais l'esprit et les sonorités synthétiques d'un Cassablanca de Warum Joe, d'un Game And Performance de Deux, ou plus récemment d'un Liqueur Amere des Cherry Pies (Beast Records et Schmalzgrub Audio Kassetten, label K7 de thee Verduns, des cousins nancéens plus ou moins affiliés, eux aussi, à la Grande Triple Alliance, 2020). La voix mélodique de la chanteuse avait aussi quelque chose à voir avec celle d'une Mona Soyoc (Kas Product).
Au milieu des années 2010, Liliane Chansard/Duverger, alias Lily 'Pourie', avait déjà tenu la basse et le micro en compagnie de Sébastien 'Normal' Pierre-Jean - personnage-clé cette scène lorraino-alsacienne- au sein du groupe kraut-punk le Chemin de la Honte. L'écoute de leur album éponyme, paru en 2015 chez les parisiens de Danger Records, m'avait rétrospectivement séduit. Le duo avait formé Delacave quelques années plus tôt, et enregistré tout au long de la décennie 2010 quatre albums qui avaient fait les beaux jours des labels POUeT ! Schallplatten, Teenage Menopause Records et La Belle Brique (la connexion amiénoise), avant de s'évaporer discrètement au tournant des années 2020. Teenage Menopause Records les avait relancés en 2023 avec le très onirique Every Night Is A Moon Rising, que Delacave nous avait présenté cette nuit de juin 2024.
Ainsi, la nébuleuse de La Grande Triple Alliance Internationale de l'Est, que ses membres avaient longtemps maintenue jalousement dans les marges du rock, et qui avait toujours donné l'image d'un collectif punk lo-fi furieusement déviant et amateur, avait accouché de quelques groupes classieux, quasiment professionnels, et sans doute beaucoup plus abordables pour le commun des amateurs de rock indépendant. Delacave, à l'instar des strasbourgeois de Marietta (Born Bad Records), semblait être l'aboutissement flamboyant, la conclusion évidente, l'apothéose finale de cette aventure épique débutée 25 ans plus tôt.
EXEK X
But EXEK was already taking over from Delacave on the Grenze stage.
The world of EXEK was familiar to me. Ben Hepworth (bass) and Andrew Brocchi (synth) had played ten years earlier with Repairs, a gothic synth-pop band whose second Ep, Cycle/Decay, had been released by Hozac Records, one of the very few labels I had still been following at the time. Albert Wolski, the lead singer of the band from Melbourne, had been a member of The Shifters x (Future Folklore Records, Trouble In Mind, 2018), who spearheaded the wave of Australian post-punk that had been sweeping Europe and the United States for the recent years. The Shifters had inspired me to delve back into DIY punk circles and discover a whole host of new bands. They were clearly one of those few bands that provided the initial impetus to start my writing and graphic work when I created my blog. My discovery of EXEK was a logical issue.
With the release of their third album, Some Beautiful Species Left (Anti Fade Records/ SDZ Records, 2019), the band gained a well-deserved recognition in France, thanks in part to the unconditional support and underground network of Parisian label SDZ Records, and EXEK's participation to the anniversary compilation of Les Disques Mauvais Garçons (Born Bad Record Shop - 20 Year Anniversary ! x, 2020), with its soaring song Too Steep A Hill To Climb.
Mais déjà, EXEK prenait le relais de Delacave sur les planches de la scène de la Grenze.
L'univers d'EXEK m'était familier. Ben Hepworth (basse) et Andrew Brocchi (synthé) avaient joué une dizaine d'années plus tôt avec Repairs, groupe synth-pop gothique dont Hozac Records, un des rares labels que je suivais encore alors, avait sorti le second Ep, Cycle/Decay. Albert Wolski, le chanteur du combo melbournois, avait officié au sein des Shifters x (Future Folklore Records,Trouble In Mind, 2018), véritable fer de lance de la déferlante du post-punk australien qui touchait depuis quelques années les rivages de l'Europe et des États-Unis. The Shifters m'avait donné l'envie de me replonger dans les milieux du punk DIY et de découvrir quantité de nouveaux groupes, et faisaient clairement partie de ces quelques groupes qui avaient fourni l'impulsion initiale pour débuter mon travail d'écriture et de graphisme, lors de la création de mon blog. Ma découverte d'EXEK s'était donc faite en toute logique.
Avec la sortie de son troisième album, Some Beautiful Species Left (Anti Fade Records, 2019), le groupe avait gagné en France une reconnaissance méritée, grâce, entre autres, au soutien inconditionnel et au réseau underground du label parisien SDZ Records, et à la participation d'EXEK à la compilation anniversaire des Disques Mauvais Garçons (Born Bad Record Shop - 20 Year Anniversary ! x, 2020), avec son planant Too Steep A Hill To Climb.
It's Just A Flesh Wound, Darling !
EXEK was kind of a prolific band. In spring 2024, the five members embarked on their third European tour in support of their sixth album, The Map And The Territory (Foreign Records, 2023). An explicit reference to Michel Houellebecq's 2010 novel La Carte et le Territoire, the graphic version of which I was reading at the same time by an unlikely coincidence, illustrated by Louis Paillard (Flammarion, 2022). I'd picked it up a few days earlier in Nancy, without yet having made the slightest connection between the writer and the musicians.
On both the novel and the album, you'll find the same unreal atmosphere, a blend of absurdity, melancholy, suspended time, passive wait-and-see attitude, disillusioned fatalism, latent depression and a ghostly overview of one's own life. The nonchalance of the musicians and the detachment of EXEK's singer, the bass lines in turn dub, post-punk or groovy, the airy easy-listening synth, the often free-jazz rhythm of drummer Sam Dixon, the drone flights and progressive rock plans of guitarist Jai K Morris-Smith, the overall sound of kraut-rock, all helped to connect the two masterpiece. We couldn't help but make the connection with certain passages on the album Présence Humaine by the versatile French artist Michel Houellebecq (Tricatel, 2000). A huge novel (winner of the 2010 Prix Goncourt!), a huge album, a huge band, for a huge concert, topped off by the grandiose songs the Lifeboats and It's Just A Flesh Wound, Darling!. And I was already looking forward to repeating the sonic, visual and intellectual experience two days later, at the La Face Cachée festival at Les Trinitaires in Metz, where EXEK had also been invited after their Paris date.
EXEK était un groupe du genre prolifique. Il effectuait au printemps 2024 sa troisième tournée européenne pour défendre son sixième album - déjà - The Map And The Territory (Foreign Records, 2023). Une référence explicite au roman de 2010 de Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire, dont je lisais au même moment la version graphique, illustrée par Louis Paillard (Flammarion, 2022). Hasard improbable de la vie, je me l'étais procurée quelques jours plus tôt du côté de Nancy, sans avoir encore effectué le moindre rapprochement entre l'écrivain et les musiciens.
On trouvait, aussi bien sur le roman que sur le disque, la même atmosphère irréelle, où se mélaient l'absurdité, la mélancolie, le temps suspendu, l'attentisme passif, le fatalisme désabusé, la dépression latente, le survol fantomatique de sa propre vie. La nonchalance des musiciens et le détachement du chanteur d'EXEK, les lignes de basse tour à tour dub, post-punk ou groovy, le synthé easy-listening aérien, la rythmique souvent free-jazz du batteur Sam Dixon, les envolées drone et les plans rock progressif du guitariste Jai K Morris-Smith, le rendu général sonnant carrément kraut-rock, contribuaient à inter-connecter les deux œuvres. On ne pouvait aussi s'empêcher d'établir le lien avec certains passages de l'album Présence Humaine de l'artiste polyvalent Michel Houellebecq (Tricatel, 2000). Un immense roman (prix Goncourt 2010!), un immense album, un immense groupe, pour un immense concert, clôturé en apothéose par les grandioses the Lifeboats et It's Just A Flesh Wound, Darling !. Et déjà, je me faisais la joie de réitérer l'expérience sonique, visuelle et intellectuelle, deux jours plus tard, lors du festival de La Face Cachée aux Trinitaires de Metz, sur lequel EXEK avait aussi été invité après sa date parisienne.